Est-ce bien de trophées dont il s’agit dans ce post ? Non, absolument pas et pourtant ce titre me qualifie totalement ! Ce ne sont pas moins de trois césariennes que j’ai subies jusqu’ici. Le terme « subi » me paraît bien choisi car elles n’ont jamais découlé d’un choix. On parle parfois de césarienne de convenance (n’est-ce pas Posh Spice ?), mais dans mon cas, il n’a été question que d’obligation médicale.
Aujourd’hui je me sens spécialiste ès césarienne en tant que patiente. Chacune d’elles a provoqué de grandes émotions en moi et m’a marqué (c’est le cas de le dire) à jamais. Je souhaite partager mon vécu afin d’informer les femmes susceptibles d’en avoir une, d’autant que ces trois opérations ont été différentes en termes de ressenti moral et physique.
Bien sûr une césarienne reste un acte chirurgical qui n’est pas anodin, ni anecdotique. Si certaines d’entre vous sont très sensibles, il vaut mieux qu’elles passent leur chemin : la césarienne n’est pas que du bonheur, mais elle permet d’accéder à beaucoup de bonheur par la suite.
Et une césarienne !
Ma première césarienne a eu lieu dans l’urgence à l’hôpital Trousseau dans le 12ème arrondissement parisien. J’avais appris une semaine plus tôt que mon accouchement devrait être provoqué. Atteinte d’une préeclampsie, avec une hypertension carabinée, je ne pouvais pas porter mon enfant beaucoup plus longtemps. Mon bébé n’avait que 31 semaines, soit 6 mois et trois semaines ! Autant dire que cette nouvelle m’avait tétanisé. Il était véritablement question de ma survie et de celle de l’enfant. Hospitalisée au service des grossesses pathologiques, j’ai donc attendu résignée les symptômes qui devaient m’envoyer directement au bloc : un poids sur la poitrine, des mouches devant les yeux… Cela n’a pas manqué d’arriver et immédiatement j’ai été transférée. Malheureusement j’étais déjà plutôt mal en point du fait de cette maladie redoutable. Complètement paniquée, j’ai demandé si mon mari pouvait m’accompagner ce qui m’a été refusé. Il a dû aller attendre dans le couloir. Une infirmière m’a rasé le bas-ventre en vue de l’incision.
Je me souviens que la salle du bloc opératoire était toute blanche, très grande et froide. J’étais au milieu allongée, un drap me cachant la partie opérée. Une anesthésiste était présente ainsi que deux internes. Ceux-ci ont commencé à deviser gaiement tandis que l’anesthésiste tournait autour de moi. Assise, j’ai fait le dos rond pour qu’elle puisse y planter l’énorme aiguille de la rachianesthésie. Cela n’a pas été douloureux mais cela a immédiatement provoqué en moi une étrange sensation dans les jambes : comme si celles-ci étaient envahies d’une gelée et de fourmillements.

Je ne ressentais absolument aucune douleur mais mentalement, c’était la déroute ! Complètement démunie, j’ai cru à un instant que l’anesthésiste prenait ma main pour me rassurer mais non, elle s’est contentée de prendre mon pouls et l’a laissée retomber. J’ai compris alors que j’étais seule et bien seule : les internes ne me parlaient pas et l’anesthésiste semblait penser que je n’avais pas plus d’affect que la table d’opération ! J’ai pris sur moi et me suis focalisée sur mon bébé. L’interne m’a enfin adressé la parole pour m’annoncer que mon enfant était tout petit mais très beau. Ma crevette d’un kilo a bien vagi, ce que je n’aurais pas cru à un tel stade de prématurité.
Le bébé a été emmené immédiatement après que je l’ai embrassé pour être placé en couveuse. En tout et pour tout, il avait dû s’écouler 5 minutes depuis l’incision horizontale de mon ventre (que je n’ai pas du tout perçue). C’est alors que les internes ont entrepris de me recoudre, ce qui m’a par contre semblé durer infiniment ! Peut-être pas plus d’une vingtaine de minutes, mais je peux vous assurer qu’on a envie de sortir au plus vite du bloc. L’impression est là encore très étrange : on se sent ballotté de tous côtés car les médecins agissent vigoureusement. On ne sait pas exactement ce qu’ils font derrière ce drap blanc mais en tous les cas, ce n’est pas que de la broderie !
Lorsque les internes ont considéré l’opération terminée, j’ai pu être emmenée en salle de réveil où je suis restée deux jours. J’étais dans un tel état de fatigue que je n’avais de toute manière pas la force de faire autre chose que dormir. Un infirmier m’a lavé et a changé mes pansements. Je ne me souviens pas d’avoir véritablement souffert , les antidouleurs sont efficaces. C’est seulement quand j’ai réintégré ma chambre que j’ai commencé à ressentir les points de suture. J’avais l’impression qu’on m’avait glissé un petit parpaing bien dur à cet endroit ! Me redresser était tout bonnement impossible et je marchais courbée comme une mamie de 95 ans.
Il a fallu que j’apprivoise la cicatrice. Le médecin avait opté pour des agrafes et la première fois que je l’ai vue, j’ai été prise de dégoût : les morceaux de métal entraient dans la chair tuméfiée qui formait un gros repli de peau violacée. Je ne pouvais pas la regarder et la toucher, n’en parlons pas…La résille de la culotte jetable s’accrochaient aux pointes des agrafes. A la douche, je me contentais de bien faire couleur l’eau savonneuse, puis de rincer et sécher soigneusement pour éviter les infections. Quand l’infirmière m’a annoncé au bout de quatre jours qu’on allait enlever les agrafes en deux temps (ou 3 ? je ne sais plus), j’ai été inquiète : est-ce que la peau de mon ventre n’allait pas craquer ? Est-ce que j’allais avoir très mal ?
Bien sûr mon ventre a tenu le choc… Par contre, l’infirmière même en faisant attention avec un petit outil spécial, n’a pu empêcher quelques picotements ou tiraillements, mais rien d’insurmontable… J’ai alors essayé d’oublier cette vilaine cicatrice qui faisait bien une bonne dizaine de centimètres de largeur. Mais mal m’en a pris…Je me suis retrouvée avec une cicatrice de type chéloïde, c’est-à-dire dire qu’elle est devenue au fil du temps boursouflée et hyper pigmentée.