De l’eau a coulé sous les ponts depuis mon dernier post. Mes belles résolutions – deux publications par semaine – n’ont pas résisté à ma reprise du travail après dix mois de congés maternité et parental. Noyée par le rythme devenu intense du train-train quotidien, je ne parvenais plus à rassembler mes idées de nouveaux sujets. Jusqu’à hier où – Eurêka – l’évidence s’est faite jour en moi.
Il me faut évoquer auprès de vous le théâtre de mon quotidien professionnel, contexte que j’abhorre souvent, mais qui parvient à m’enchanter encore (parfois) :
Paris
Je travaille dans Paris intra-muros depuis 2006. Soit 13 ans que je fréquente la capitale ! Je n’aurais jamais cru cela possible dans ma jeunesse, mes parents m’ayant bassinée depuis mon plus jeune âge avec les défauts de Paris. Ils y avaient vécu pendant leurs études et en avaient gardé un souvenir déplorable. De ce fait, ils m’ont toujours seriné : la province à tout prix, plutôt crever que vivre à Paris !
La lune de miel
Et pourtant, voilà 13 ans, dans les pas volontaires de mon cher et tendre, j’y posais mes valises, tremblante et curieuse. Et là, bizarrement, j’y ai été heureuse ! J’ai trouvé un travail en adéquation avec mes compétences quatre mois après mon arrivée alors qu’à Nantes, je végétais dans un emploi alimentaire. Ah, le dynamisme économique de Paris est sans pareil !
J’ai vécu pendant trois ans et demi dans le douzième arrondissement, dans le quartier Picpus. Un arrondissement familial, convivial et commerçant, relativement vert grâce à la proximité de la promenade plantée et du parc de Vincennes. Des lieux somme toute plutôt tranquilles ramenés à la cohue habituelle de la cité intra-muros…

Loin d’être de grands fêtards, nous nous trouvions comme des poissons dans l’eau dans ce quartier bien desservi : nous ne mettions alors pas plus d’un quart d’heure pour aller chez nos employeurs respectifs ! Qui dit mieux, même en province !
Le divorce
» Avec le temps, va, tout s’en va… » chantait très justement Léo Ferré. Effectivement, au fil du temps, notre plaisir à vivre au cœur de la capitale s’est plus qu’émoussé. Ce qui a contribué en premier lieu fortement à ce désamour fut la vue, ou plutôt devrais-je dire l’absence de vue. En face de notre logement (un charmant bloc d’au moins dix étages) se trouvaient de non moins charmants immeubles, certes moins hauts, mais pas franchement ébouriffants. Le petit parterre de gazon au pied de notre bâtiment ne suffisait plus à calmer notre soif de nature ! Le béton nous sortait par les yeux, nous rêvions de verdure et d’un panorama avec une ligne d’horizon.
Je tombais enceinte de notre premier enfant. Avoir une chambre de plus impliquait une coquette inflation de notre loyer, déjà bien rondelet. Promener un bébé dans ce paysage minéral et pollué ? Très peu pour nous ! Comme bon nombre de parisiens d’adoption, nous choisîmes l’exode en banlieue. Après un petit détour malheureux de 9 mois en première couronne, nous finîmes par poser nos guêtres en grande banlieue où enfin arbres et fleurs avaient droit de citer. Mais depuis…
Depuis 2010, je me rends chaque semaine dans le 4ème arrondissement parisien pour travailler. Soit 1h15 matin et soir porte à porte. Sans aucun doute mes relations houleuses avec le RER B feront l’objet un jour (de rage) d’un post.

Le 4ème arrondissement, me direz-vous, est l’un des plus magiques de Paris ! Je suis entourée de Notre-Dame, de la Sainte-Chapelle, du Marais, de la Tour Saint-Jacques, spots touristiques des plus fameux… Mais aussi d’un nombre de commerces tout à fait prodigieux : les pâtisseries et restaurants les plus courus, les boutiques des marques les plus pointues : tout ce que vous pouvez chercher de désirable s’y trouve (à part l’hyper luxe). La Seine est à vos pieds enserrant les deux îles. Que demande le peuple alors ?
Le réquisitoire
Je demande du civisme et de la bienveillance. Or jour après jour, Paris m’offre :
- du bruit : les voitures s’agglutinent sur les quais, toujours plus nombreuses. Ronronnement des moteurs, klaxons stridents ; la circulation épuise nos tympans et pas que…
- de la puanteur : cela sent les pots d’échappement et la pisse, voire pire dans les petites rues à côté de mon travail. Et quand la chaleur ‘en mêle, à moi le pince-nez.
- de la pollution : les yeux piquent, la gorge est asséchée, on respire moins bien et le mercure monte, monte dès que le soleil pointe le bout de son nez (1 à 2°C de plus qu’en grande banlieue). Le pompon : le nuage de plomb qui a aspergé les environs lors de l’incendie de Notre-Dame et qui menace la santé des personnes à proximité.
- de la foule : les abords de Notre-Dame sont submergés quotidiennement par des hordes de touristes. Ils traînent, ils encombrent les trottoirs à faire des selfies. C’est moche à dire mais ils me compliquent la vie quand je cours après mon RER le soir.
- La saleté : des crottes de chien, en veux-tu en voilà… Les pigeons se chargent également de customiser les monuments (et nos manteaux parfois).
Peut-être vais-je vexer quelqu’un à dépeindre un tel tableau, mais je ne crois pas l’avoir noirci injustement. Je vais même enfoncer le clou davantage en évoquant la misère que je côtoie dans ces arrondissements pourtant cossus. Roms, migrants, clodos alcooliques, ils sont tous visibles dans ce quartier sur les grandes artères comme Rivoli. Quand je suis arrivée de Nantes, j’étais extrêmement choquée par toute cette mendicité. Je me suis blindée depuis. Depuis quelques années, le nombre de personnes faisant la manche ou dormant dehors semble avoir augmenté dramatiquement dans la zone.
Paris centre, à mes yeux, c’est l’agression pure des sens. On s’en prend plein la figure, ce qui est usant à la longue. Je subis la plupart du temps mes allers et venues sur Paris.
La trêve
Dans toute cette détestation surnagent encore quelques plaisirs parisiens :
- Quand je débarque de mon RER le matin à 8h15, la ville s’éveille. Notre-Dame se dresse altière et lumineuse face à son parvis quasi vide (maintenant il est encombré de tentes de chantier). Quand vous rejoignez les quais via les îles et que vous voyez un halo rose embrasser le Louvre, il est difficile de ne pas savourer cette vue de toute beauté.
- Si j’ai besoin d’un shot de matérialisme, je me rends au BHV (Bazar de l’Hôtel de ville) tout proche. Les rayons rutilent de mille feux. Toute cette perfection m’apaise, même si je passe très rarement à l’achat.

- Je ne dédaigne pas une ballade dans le Marais, ce quartier snob mais pourtant accueillant. On y trouve les meilleurs pâtissiers de Paris, toutes les marques imaginables. En clair toutes les marques de mode et cosmétiques moyen/haut de gamme y ont un magasin car c’est un haut lieu de la branchitude. Cela ne m’est pas déplaisant, mais ce que j’y préfère, c’est la circulation quasi inexistante, ses petites rues bien entretenues et le peu de monde en pleine journée. Il vaut donc mieux s’y réfugier et éviter l’axe Rivoli qui présente un aggloméré de tout ce que je hais à Paris.

- Dans la palette de mes petits bonheurs parisiens, je demande enfin l’île Saint-Louis exempte de toutes les nuances que j’exècre (à part deux ou trois restaurants qui matraquent les touristes : 4€ la bouteille d’eau plate !). Elle offre de beaux points de vue sur la Seine. Ce qui est rare dans la capitale (à part à Montmartre par exemple), on peut y apprécier de grandes perspectives sur les berges de l’hypercentre et cela dans un calme relatif. Faire le tour de l’îlot me détend les pattes et le cerveau. En son cœur, rien de notable excepté deux glaciers, Amorino et Berthillon, c’est reposant.

Une relation impossible ?
Actuellement je ne peux apprécier la ville lumière en l’état. Peut-être qu’un jour la voiture en sera bannie ? L’augmentation des véhicules électriques en circulation devrait améliorer les conditions de vie, le bruit et les gaz d’échappement devant alors quasi disparaître. Je ne vois pas comment la foule pourrait diminuer alors que le tourisme mondial explose ! Peut-être que des législations internationales viendront limiter le trafic aérien très nocif pour la planète ?
Si j’habitais sur place, je crois que je serais plus qu’attentive aux prochaines élections municipales. Bien que l’une des villes les plus chères du monde (et les moins vertes !), Paname a encore du chemin à faire pour rendre la vie plus douce à ses résidents et travailleurs.
Il est possible que ce post ait hérissé les plus Paris addicts d’entre vous. Mais tout l’intérêt d’un blog étant la mise en valeur d’un avis très subjectif, je me permets d’être très franche sur mes sentiments à l’égard de la capitale.
Partageons nos points de vue. Vous adorez Paris ? Vous la détestez ? C’est le pourquoi de cela qui m’intéresse…

Je ne suis pas une bonne photographe. Les photos ont été trouvées sur le net. J’en remercie les auteurs anonymes.